jeudi 9 mai 2013

Remonter de 1623 à 1408


Ah, magie de la numérisation d'archives grâce à laquelle je peux faire des bons de géant dans ma généalogie et faire des trouvailles qui auraient été le fait d'une vie entière autrement. En cherchant si les archives d'Orléans étaient sur Geneanet, je suis aussi allé voir sur le département du Cher dans les "archives et relevés". Une catégorie "Lieux inconnus" a éveillé ma curiosité. Je suis tombé sur de nombreux cahiers dont je ne comprenais pas grand chose avant de réaliser que je suis tombé sur une véritable mine d'or : le fond Girard de Villesaison.

Cet homme a passé une vie à éplucher les archives notariales de la ville de Bourges et à reconstituer les principales familles. Je suis immédiatement allé voir sur mes Jaupitre et j'ai trouvé de nombreux et précieux renseignements. Voici comment fonctionne ce fond :

  • les notes généalogiques sont des reconstitutions des familles par degrés à la manière des nobiliaires et possèdent de nombreuses références vers les cahiers généalogiques (numéro du cahier et page).
  • les cahiers généalogiques contiennent la transcription totale de tous les actes notariés de Bourges grâce auquel l'auteur a pu reconstituer les parentés.
Après avoir trouvé des renseignements sur de nombreuses familles de ce côté de la famille, j'ai voulu chercher sur mon ascendance Davril, une famille de Châteauneuf-sur-Cher dont l'acte le plus ancien que j'avais trouvé à ce jour datait de 1623 :

(source : Archives départementales du Cher - 3E468 - p. 82)
"Le treizie decemb aud An a esté baptisée Jehanne fille de Me Jehan d'avril Greffier a Channeuf et Anne Poncet ses parain e maraine sont Me Guillaume Picherron [?] e Jehanne Poncet soeur de la susdte Anne Poncet"
La famille Davril a donc donné des greffiers, procureurs, notaires, etc. tous installés à Châteauneuf-sur-Cher au début du XVIIème siècle. Je n'en savais pas plus pour l'instant et forcément, la partie alphabétique qui concernerait cette famille n'est pas encore mise en ligne sur le fond Girard de Villesaison.

Armes de la famille Davril
(source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
 Ne baissant pas les bras pour autant, je vais voir s'il parle d'une famille Poncet car je savais que des Poncet vivaient à Bourges. Et dans le fonds Girard de Villesaison, je trouve cette indication :

(source : Archives départementales du Cher - 2F254 - p. 192)
On voit bien une Anne mariée avant 1620 à Jean Gouraud et en secondes noces avant 1621 à Jehan Davril. Les dates coïncident avec le baptême le plus ancien que j'aie trouvé pour ce couple en 1623.

Remontant la famille Poncet, j'arrive à un couple Alain Poncet et Jeanne Tullier, mariés vers 1510. Essayant de trouver des renseignements dans la bibliothèque de Geneanet, je tape "Alain Poncet" dans le moteur de recherche et je tombe sur un seul et unique résultat : Mémoires de la société des antiquaires du Centre, mis en ligne sur Gallica/BnF où j'ai l'intégralité de la généalogie des Poncet (également contenue dans l'Histoire de Berry de Gaspard Thaumas de la Thaumassière).

(source : Mémoires de la société des antiquaires du Centre, p. 286, via Gallica/Bnf)
Remontant sur cette famille Tullier, j'apprends qu'ils ont été maires de Bourges et qu'un fils de cette famille (Pierre Tullier, doyen du chapitre de Bourges) fit réaliser un vitrail dans la chapelle Tullier située dans la Cathédrale de Bourges ! Sur ce vitrail, de nombreux membres de cette famille, dont mes ancêtres, Denis Tullier et Marie Bonin. Quelle chance inouïe de pouvoir avoir une représentation d'ancêtres du XVème siècle !

Pierre Tullier et Marie Bonin (source : MOSSOT, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)
Pour conclure, je vais donner ici la copie de la présentation de cette famille dans les Mémoires de la société des antiquaires du Centre :

Les armes de cette maison sont : d'azur au chevron d'or, accompagné de trois étoiles d'argent, 2 et 1. - SUPPORTS : deux licornes affrontées d'argent ; cimier : une triple couronne murale du même métal ; DEVISE : FIAT VOLUNTAS TUA.
Grandes armes de la famille Tullier
(source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
Tous les auteurs s'accordent à dire que la famille TULLIER, que l'on voit figurer dans les anciens contrats sous diverses appellations de Thieullier, Thuillier, de Tuillier, et plus généralement Tullier, tire son origine de la province de Bretagne. Le premier par lequel nous commençons cette généalogie, a dû venir à Boruges vers 1408, car la tradition se plaît à le représenter comme assez proche parent d'un Me Robert Thuillier, l'un des députés pour la recherche du meurtre commis à Paris, en 1407, sur la personne de Louis Ier, duc d'Orléans, fils de Charles V, par les ordres de son frère et rival Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne.

Meurtre du duc Louis d'Orléans, par le Maître de la Chronique d'Angleterre
(source : Bibliothèque nationale de France, domaine public, via Wikimedia Commons)
Ce Robert Thuillier, qu'Alain Chartier qualifie seulement de conseiller du roi, et que d'autres chroniqueurs font lieutenant civil et maire de Rennes, était attaché à la personne de ce malheureux prince ; les démarches actives qu'il fit pour seconder la duchesse, sa veuve, dans l'obtention de la justice qu'elle demandait au roi contre l'auteur de ce crime, lui attirèrent la haine du parti de Bourgogne, et cette haine se serait étendue sur tous les membres de la famille Thuillier. 

Valentina Visconti pleurant son mari le Duc d'Orléans, par Fleury-François Richard
(source : domaine public, via Wikimedia Commons)
Denis Thuillier ou Tullier aurait donc été contraint de s'expatrier pour échapper à la persécution qui le menaçait, et aurait demandé asile et protection à Jean, duc de Berry, qui l'aurait attiré à Bourges, où il lui aurait donné un emploi dans sa maison.De ce Denis est issu une nombreuse famille qui, pendant plus de 400 ans, a tenu à Bourges un rang distingué, remplissant les postes les plus honorables dans l'église, l'armée, la magistrature et l'université. Elle acquit la noblesse presqu'à son arrivée en Berry, par l'élévation de l'un de ses membres au mairat de la ville de Bourges (1479), suivant la constitution donnée à cette bonne ville en 1474, par le roi Louis XI, et ses descendants en ont toujours joui jusqu'à la Révolution, ainsi que des privilèges qui y étaient attachés."
Encore une fois, donc, une famille de noblesse de cloche (anoblie par ses charges municipales) ce qui explique sûrement la couronne murale comme cimier de leurs armes (qui est plus utilisée pour les blasons des villes que pour ceux des personnes). J'aurai l'occasion d'explorer davantage cette famille car il paraît que par les Bonin, ils sont reliés aux Bastard dont nous descendons déjà par les Jaupitre. Dans tous les cas, ma famille maternelle a des racines dans le Berry depuis plus de 600 ans ! Quelle chance d'avoir pu remonter jusqu'au Moyen Âge. Je retourne maintenant dans le Loir-et-Cher pour continuer mon exploration dans l'ordre des sosas afin de ne négliger aucune piste. Pour ceux qui ne comprendraient pas comment nous sommes reliés aux Tullier, voici notre ascendance depuis le plus ancien Tullier jusqu'à mon arrière-grand-père.

(source : Arbre familial, via Geneanet)

8 commentaires:

  1. Hallucinant toutes les découvertes que tu as pu faire!
    J'ai vu en effet ce fonds en début de semaine mais je ne voyais pas de quoi il traitait car aucune description n'y était faite.
    Il ne concerne que Bourges?

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    1. Au début je ne comprenais pas vraiment en quoi consistait ce fond, mais il s'agit en effet des dépouillements des registres notariaux concernant les familles notables de Bourges. C'est drôle, parce que je suis tombé dessus tout à fait par hasard. C'est incroyable le nombre de découvertes infinies qu'on peut faire concernant nos familles !

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  2. Whaouh ... impressionnant

    et les ancêtres sur le vitrail, ca c'est époustouflant :)

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    1. Oui, d'autant qu'ils ont été réalisés du vivant de leur fils. On peut donc imaginer que les portraits son fidèles. En tout cas, tous les visages sont personnifiés, ce qui peut permettre de penser qu'il s'agit d'une représentation réelle de mes ancêtres. C'est clair que c'est une chance inouïe d'avoir des portraits aussi anciens ! Je ne croyais même pas que je trouverais le vitrail sur internet (merci Wikimedia), mais j'ai quand même envie d'aller à Bourges pour le voir en vrai.

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  3. En effet, voir ses ancêtres sur des vitraux, voilà qui n'est pas ordinaire ! Bravo pour toutes ces recherches... et toutes ces trouvailles.

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    1. N'est-ce pas ? J'ai beaucoup de chance. C'est la magie d'internet et des généalogistes qui nous ont précédés. En 3 heures et quelques clics, je remonte de 200 ans dans le temps, chose qui aurait été impossible si j'avais entrepris des recherches il y a 10 ou 20 ans.

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  4. Artemisia Solo26 mai 2013 à 21:28

    il me semble que ce sont ces mêmes vitraux qui figurent dans le générique de début de la saison 2 de la série Borgia ( de Canal+ )???? A vérifier, mais j'en suis presque sûre. Une chose au moins est certaine, ils sont vraiment très beaux !

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    1. J'y ai pensé également, mais ce ne sont pas les mêmes a priori (pourquoi prendre des vitraux de Bourges pour une série se passant à Rome ?). Néanmoins, ils ont été fait à la même époque que l'histoire des Borgia et ceux utilisés pour la générique de la série doivent également dater du début de la Renaissance. En tout cas, une chose est sûre, même avec deux papes dans la famille (des "oncles" éloignés), nous ne descendons pas des Borgia !

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