lundi 27 mai 2013

Mère à 54 ans ?

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 5MI194/R27 - p. 504)
Dans mon dernier billet, je parlais d'une mère âgée de 51 ans à la naissance de son enfant Jean Michel. Cette mère, c'est mon ancêtre Marie Jeanne MEIGNAN. Alors de deux choses l'une : soit cette femme est en train de battre le record de la grossesse la plus tardive possible, soit il y a anguille sous roche. Je sais qu'il y a quelques généablogueurs médecins, peut-être pourront-ils m'éclairer.

Le 21 nivôse an VII (10 janvier 1799), Jean PINON se rend à la mairie accompagné de son fils Georges Modeste PINON et de sa belle-fille Madeleine SALMON pour déclarer la naissance de son onzième enfant : Michel Benjamin.

Seulement, il y a un hic : Marie Jeanne MEIGNAN, la mère de l'enfant, a alors 54 ans ! Est-il seulement possible d'être enceinte à cette âge ?

Faubourg d'Orléans à Romorantin où vécurent les Pinon à la fin du XVIIIème siècle
(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 6 Fi 194/242)
Une autre hypothèse vient de germer dans mon esprit : Jean et Marie Jeanne déclareraient cet enfant (et peut-être le précédent) comme le leur, comptant sur la difficulté pour l'officier d'état-civil de comprendre les dates du calendrier républicain, pour cacher la grossesse illégitime d'une de leur fille. Examinons les filles de cette famille :


  • Jeanne Magdeleine est morte à l'âge de 3 ans en 1782.
  • Jeanne Madeleine, sa soeur, née en 1783, ne semble toujours pas mariée à cette époque. Il pourrait s'agir de la mère de cet enfant.
  • Marie Solange se marie en 1809 et donne naissance en 1819 à Adélaïde DEBOUT, qui épousera son cousin germain (et mon ancêtre) en deuxièmes noces Jean Pierre PINON (on reste en famille dans le Loir-et-Cher)
Conclusion, soit Michel Benjamin est le fils illégitime de Jeanne Madeleine PINON, déclaré au nom de ses grands-parents. Soit Marie Jeanne MEIGNAN a vraiment vécu une ultime (?) grossesse à l'âge de 54 ans ...

dimanche 26 mai 2013

Jean Michel PINON, l'enfant de la dernière chance


En ce jour de Fête des Mères, j'ai trouvé une mère bien tardive. Tout est parti de cet acte :

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 5MI194/R27 - p. 17)
"aujourd'huy quatre pluviose de l'an quatre de la république française une et indivisible à quatre heures du soir par devant moi nicolas Gabriel Anselin membre de l'administration municipale de la commune de romorantin département de loir et cher est comparu jean pinon vigneron assisté de paul philippe Galicher agé de cinquante cinq ans et jean champenois agé de cinquante ans tous deux proprietaires et domiciliés de cette commune, lequel m'a declaré que jeanne meignan son épouse en legitime mariage est accouchée d'hier à neuf heures du soir d'un fils au quel il a donné les prénoms de jean michel, d'après cette declaration et la representation qui m'a été faite de l'enfant denommé j'ai redigé le présent acte, que les comparant et témoins ont signés avec moi. fait en la maison commune les jour et an susdits"
Jusque-là, un acte de naissance tout ce qu'il y a de plus banal. Pour ceux qui ne sont pas familiers du calendrier révolutionnaire, le 4 pluviôse an IV correspond au 24 janvier 1796. Quand j'ai rentré cet acte dans mon logiciel Heredis, il a immédiatement déclenché une alerte dont je m'étais douté en voyant que le premier enfant de ce couple est né en 1769, soit 27 ans plus tôt !

Marie Jeanne MEIGNAN est à nouveau mère à l'âge de 51 ans après avoir donné naissance (d'après mes recherches qui ne sont pas encore complètes pour cette famille) à neuf enfants : Jean, Sébastien, Georges Modeste, Jeanne Magdeleine, Claude, Jeanne Madeleine, Marie Solange, Jean Pierre et Etienne.

Parenté de Marie Jeanne Meignan à mon arrière-grand-père
(source : Arbre familial, via Geneanet)

J'ai toujours (sûrement à tort) imaginé qu'avec ces grossesses répétées et la quasi absence de médecine à l'époque, que les femmes n'avaient pas de grossesses si tardives, sauf à risquer leur vie et celle de leur bébé. Je trouve quand même relativement exceptionnel d'avoir à nouveau un enfant à cet âge extrêmement avancé. L'enfant était-il viable ou avait-il un problème génétique (type trisomie) ? Dans ce dernier cas, l'officier d'état civil l'aurait-il indiqué sur l'acte ? J'imaginais surtout que la plupart des femmes étaient ménopausées à cet âge et j'avoue n'avoir jamais cherché d'enfants au delà d'environ 45 ans pour reconstituer mes fratries.

J'ai un autre exemple dans mes ancêtres d'enfant de la dernière chance. Nous descendons de Pierre François GRELOT dont les parents François GRELOT et Anne GAUDRY se sont mariés tous deux à 48 ans. Il fut leur seul enfant en 1760. Connaissant la mortalité infantile extrêmement élevée à l'époque, nous avons une chance incroyable d'être sur Terre aujourd'hui,

Cet enfant unique rattrapera son retard en deuxièmes noces (sa première épouse fut assassinée sous la Terreur) en ayant lui-même 13 enfants ! Et vous, avez-vous des enfants extrêmement tardifs parmi vos ancêtres ?

lundi 20 mai 2013

De garçon meunier à blanchisseur de toile


Continuant de rechercher les enfants du couple BOURDERIOU / DORÉ à Romorantin, je me suis retrouvé au début de l'an II de la République française et je suis tombé sur un acte de mariage entre Etienne SABART et Marie Madeleine MAUCHIEN.

Je ne sais pas pourquoi, mais ce nom d'Etienne SABART me disait quelque chose. Peut-être parce que j'avais encore en tête la seconde épouse de Pierre Firmin DELAHAYE, de mes mystérieux ancêtres d'Orléans.

(source : Arbre familial, via Geneanet)
Toujours est-il que je regarde de plus près qui sont les parents du marié.

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 5MI194/R26 - p. 231)
"... sont comparus en la Salle publique delamaison Commune dudit Romorantin Etienne Sabart voiturier parterre agè de cinquante deux ans fils de défunt Etienne Sabart et de Margueritte Audouin et Marie Madelaine Mauchien agée de quarante un ans ..."
Audouin, voilà un nom qui me dit également quelque chose, surtout associé à Sabart. Je descends bien d'une Anne AUDOUIN, femme au XVème siècle d'un François JOURDAIN, chevalier, seigneur d'Ambleville et de Virsay, dans la Charente, mais il ne peut pas s'agir de cette famille...  Je tape le nom sur ma base généanet et soudain tout s'éclaire.

(source : Arbre familial, via Geneanet)
François AUDOUIN, journalier à Romorantin (mon sosa 1378) a eu au moins deux filles d'après mes recherches actuelles.

  • Hélène, mon ancêtre, mariée à Jean SOUCHAY, blanchisseur de toile. 
  • Marguerite, sa soeur, mariée à Etienne SABART, journalier.
Ce second couple est bien celui des parents de notre Etienne SABART époux de Marie Madeleine MAUCHIEN. Comme je souhaite à terme réaliser toute la généalogie descendante de notre famille, je rentre cet acte de mariage trouvé absolument par hasard. Comme il s'agit d'un acte post-révolutionnaire, les dates de naissance des mariés sont indiquées. Et comme je trouve important de toujours tout vérifier, je vais rajouter ces deux actes aux fiches de ce couple. 

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/9 - p. 74)
"L'an Etjour que dessus a Este par moy vicaire soussigné baptise un fils né hier du Legitime mariage d'Estienne Sabar journallier et de margueritte audoin de cette paroisse il a Este nomme Estienne il a Eu pour parrain jean Souchay garcon meusnier et pour maraine helaine audoin Sa tante qui ont declare ne scavoir signe de ce Enquis Le perre absent. Robin vicaire de Romtin"
Comme souvent après le premier enfant où les grands-parents sont parrain et marraine, ce sont les oncles et tantes qui se retrouvent dans ce rôle. Et ces oncle et tante ne sont autres que le couple SOUCHAY-AUDOUIN de mes ancêtres que nous avons vu plus haut et qui sont fraîchement mariés depuis quelques mois.

Avoir été curieux concernant une branche cousine de ma famille m'a apporté beaucoup. En effet, les registres de Romorantin ne sont pas très généreux en terme de métiers et ils sont rarement précisés. Je ne connais les métiers de certains ancêtres que parce que sur un seul des actes de baptême ou de sépulture d'un de leur dix enfants est donné un métier pour les parents. J'avais donc établi que Jean SOUCHAY était blanchisseur de toile. Pour ceux qui seraient curieux de connaître ce métier, voici la définition donnée dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert.

(source : Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, tome second, p. 275 par
Denis Diderot et Jean Le Rond d'Alembert, via Gallica/BnF)
Grâce à cet acte de baptême, j'apprends que Jean SOUCHAY, alors âgé de vingt-cinq ans, s'était lancé dans un apprentissage pour devenir meunier avant de devenir blanchisseur de toile. Ce qu'il serait intéressant d'apprendre maintenant, c'est à quel moment de sa vie Jean SOUCHAY a décidé de changer totalement de métier...

jeudi 16 mai 2013

Marie Madeleine VALLET, morte à l'hôpital

En ce début de république française, l'an 1793, j'ai trouvé l'acte de décès d'une ancêtre, Marie Madeleine VALLET, qui est à mi-chemin entre la précision en détails de certains actes paroissiaux et le côté administratifs des actes d'état-civil naissants.

Liens de parenté entre Marie Madeleine VALLET et mon arrière-grand-père
(source : Arbre familial, via Geneanet)
Marie Madeleine VALLET, femme de Claude BOURDERIOU, est la mère de cet autre Claude BOURDERIOU dont je cherche l'acte de mariage mystère avec Anne Marguerite DORÉ.

(source : Archives départementales de Loir-et-Cher - 5MI194/R26 - p. 142)
"aujourd'huy dix neuf may mil sept cent quatre vingt treize l'an deux dela république française à onze heures et demie du matin nous jean françois prudhomme officier public de la commune de romorant... canton et district du même lieu departement de loir et cher en la maison commune avons reçu l'avis de Gabriel Anselin aumonier de l'hopital établie en la ditte commune demeurant au dit lieu, qu'il étoit décédée aujourd'huy au dit hopital a onze heures du matin une femme et pour nous assurer du décés nous nous sommes transporté au dit hopital où était arrivé l'aumonier susnommé et joseph huard secretaire dela Municipalité du dit romorantin y demeurant nous ont declaré quelle s'appeloit Marie Vallet agé de soixante dix huit ans de cette paroisse veuve de claude Berdouzou et aprés nous être assuré du décés avons dressé le present acte que les susnommés ont signés avec nous sur le registre double les dits jour et an que dessus."
D'après le site internet du ministère de la culture, l'hôtel-dieu de Romorantin date du XVème siècle et a été remanié plusieurs fois, notamment au XIXème siècle. J'en ai trouvé deux photos intéressantes sur internet.

(source : Cercle de recherches généalogiques du Perche-Gouët)
(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 6 Fi 194/127)
Certes, le bâtiment dans lequel est décédée Marie Madeleine VALLET était plus ancien que celui qui demeure à présent. Mais c'est néanmoins au même emplacement que s'est toujours situé un hôpital à Romorantin. L'aumônier fait une erreur sur son âge, puisque Marie Madeleine était âgée de 72 ans environ au moment de son décès. Bel âge néanmoins pour l'époque. Était-elle tombée malade dans sa vieillesse pour qu'elle soit placée à l'hôpital ?

Après Jean TARDY décédé à l'hôpital San Bernabé de Palencia en Espagne en 1810 et Louis François GASNIER décédé à l'hôpital du Mans en 1826, c'est le troisième membre de ma famille dont je trouve le décès dans un hôpital, à une époque où l'on mourrait d'ordinaire plutôt chez soi.

mardi 14 mai 2013

Jean Michel Villardery : "Citoyens, la patrie est en danger"


Les découvertes semblent arriver chaque matin en ce moment. Ouvrant les registres de 1792 à Romorantin, je suis tombé sur une page noircie de notes diverses.

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/53 - p. 1)
Je commence à regarder de plus prêt, car on trouve parfois des actes oubliés ou des indications amusantes sur ces pages de registres, et je tombe sur une note écrite par Jean Michel VILLARDERY. Les Villardery sont une famille lettrée de tissiers en draps (voir le magnifique article sur les drapiers écrit par Odile Halbert). Je descends d'une fille de la famille, Madeleine Catherine, et il s'agit ici de son frère, Jean Michel. Voici nos liens de parenté dans le cas où ce ne serait pas clair (jusqu'à mon arrière-grand-père, comme à l'accoutumée).

(source : Arbre familial, via Geneanet)
Voici ce que dit cette étonnante, précieuse et touchante note écrite sur la première page du registre, comme un avertissement à ceux qui allaient le recevoir dans la généralité :

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/53 - p. 1)
"dit citoian aLapatrie est endengé meté vous Sur vost jaré fait part mi j michel vilardery"
Ah, le doux langage texto de la Révolution ! Voici le sens de ce texte : "Dit, citoyen, la patrie est en danger. Mettez-vous sur vos gardes. Fait par Michel Villardery." Que voulait-il dire ? Mettait-il en garde contre la Révolution ou au contraire contre un complot royaliste (le Centre de la France étant traditionnellement plus républicain), l'année même où Marie Antoinette a été exécutée ? Je pense que le mot "citoyen" le place plutôt du côté des républicains.

En tout cas, c'est très émouvant de voir ce message écrit d'une main hésitante par ce membre de notre famille qui a prit la peine d'essayer de rassembler tout son orthographe pour le faire passer. Un message qui traverse les siècles et se retrouve sur internet, jusqu'à nous !

lundi 13 mai 2013

Jean Toussaint Souchay, soldat au régiment de Vexin

Ce matin, je suis tombé par hasard, en 1791, sur l'acte de mariage du frère d'un de mes ancêtres, Jean Toussaint SOUCHAY, avec Marie JOULIN.

Liens de parentés entre Jean Toussaint Souchay et mon arrière-grand-père
(source : Arbre familial, via Geneanet)
Jusque là, rien de très extraordinaire. A Paris, le roi est devenu "roi constitutionnel", mais la société n'a pas encore basculé complètement dans la République. Néanmoins, deux détails ont attiré mon attention sur cet acte.

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/52 - p. 3)
"nous vicaire Soussigné avons pris le mutuel consentement de toussaints Souchai âgè de vingt huit ans Soldat au Regiment de Vexin compagnie de Bresse fils de feu Jean Souchay et d'helene haudouin d'une part et de Marie joulin..."

  • Un militaire :

Un militaire d'ancien régime ! Voilà qui est assez rare pour être relevé. De quel régiment s'agit-il exactement ? Le régiment de Vexin a été créé en 1674. Voici son drapeau en jusqu'en 1791 :

(source : Arnaud Bunel, via Vexillologie militaire européenne)
L'uniforme qu'a vraisemblablement dû porter Jean Toussaint pour son mariage est le suivant.

(source : Erwin Lindemann, domaine public, via Wikimedia Commons)
  • Un régiment pas encore réformé :
Plusieurs choses m'intriguent néanmoins dans cet acte que seuls de futurs actes concernant ce couple pourront confirmer ou infirmer. En 1791, le régiment de Vexin est réformé et se nomme désormais le 72ème régiment d'Infanterie de Ligne. Certes, notre mariage a lieu le 15 janvier et l'information n'a sûrement pas eu le temps de circuler à travers tout le royaume de France jusqu'à Romorantin. Le drapeau de ce nouveau régiment sera le suivant : 

(source : Arnaud Bunel, via Vexillologie militaire européenne)
Délicat assemblage du bleu-blanc-rouge républicain et de la fleur de lys monarchique dans cette période d'essai de monarchie constitutionnelle. 

  • Une permission de Monaco :
Jean Toussaint se marie dont en indiquant l'ancien nom de son régiment, et il reçoit l'autorisation de son commandant (comme pour tout militaire) pour se marier : 

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/52 - p. 3)
"vuë la permission à luy accordée de Monacho par Son commandant signée lansche..."
Permission qui lui est accordée depuis ... Monaco ! Sachant que le Vexin se trouve dans le nord de la France, c'est plutôt étonnant. Enfin, ni Jean Maurice (mon ancêtre), ni Jean André, les frères du marié, ne sont présents à ce mariage, ce qui me fait élaborer la théorie suivante : Jean Toussaint est-il un combattant indépendant d'un régiment sécessionniste émigré dans le sud de la France au moment des troubles révolutionnaires ? Auquel cas, ses frères, n'approuvant pas, ne seraient pas venus à son mariage, mais seule sa mère. Ou alors, Jean Toussaint est simplement un soldat d'un régiment qui n'est pas encore au courant de son nouveau nom et le commandant se trouvait être à Monaco au moment d'envoyer l'autorisation de mariage. Mais il serait fâché avec ses frères ?

Si ce couple reste à Romorantin et que je vois une modification dans la profession de Jean Toussaint, j'aurai une ébauche de réponse.

samedi 11 mai 2013

Fiche de recherches du mariage Claude BOURDERIOU et Anne Marguerite DORÉ

Je vais ici faire figurer l'état de mes recherches sur ce couple, mais d'abord, quelques explications. Mes recherches sur cette famille commencent avec cet acte de baptême :

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/41 - p. 48)
C'est la première trace que j'ai de ce couple, par le baptême de mon ancêtre, Anne Louise BOURDERIOU en 1780. Par leurs actes de décès respectifs, j'ai pu retrouver leurs actes de baptême.


  • Claude BOURDERIOU (sosa 322) est né en 1759 à Romorantin, fils de Claude BOURDERIOU et de sa deuxième épouse Marie Madeleine VALLET
  • Anne Marguerite DORÉ (sosa 323) est née en 1757 à Romorantin, fille de Louis DORÉ et de sa deuxième épouse d'Anne BLONDEAU
Les deux mariés sont originaires de Romorantin, j'aurai donc dû trouver leur acte de mariage à Romorantin et je n'ai trouvé aucun enfant avant 1780. Problème, aucun acte de mariage en vue. Pourtant, Anne Louise, leur fille, est dite issue "du légitime mariage".

On se mariait souvent dans la paroisse de la mariée, or, Louis DORÉ, son père, était voiturier. Il aurait pu vivre ailleurs à un moment donné. Je vais d'abord commencer par chercher dans les anciennes paroisses rattachées à Romorantin de 1774 (Claude BOURDERIOU aurait 15 ans, on se mariait rarement avant) à 1780. Ces paroisses sont : 
  • Monthault
  • Lanthenay 
  • Hôtel-Dieu
Si je ne trouve rien, je commencerai à chercher dans les communes voisines dans l'ordre. Bigenet n'a pas trace de ce mariage, nulle part en France et personne sur Geneanet ne l'a trouvé. On ne pouvait pas se marier uniquement par contrat, surtout vu les professions de vignerons et journaliers qu'exerçaient ces familles. Il doit donc bien y avoir un acte de mariage quelque part. 

Cet article est une sorte de bouteille à la mer, si jamais quelqu'un avait vu pareil acte. En attendant, je vais faire la liste des registres dépouillés afin de ne pas faire la même recherche plusieurs fois.

  • LANTHENAY 1776 : rien
  • MONTHAULT 1776 : rien
  • ROMORANTIN 1776 : trouvé une Marthe DORÉ (pas de lien évident)
  • HOTEL-DIEU 1777 : rien
  • LANTHENAY 1777 : rien
  • MONTHAULT 1777 : rien
  • ROMORANTIN 1777 : rien
  • HOTEL-DIEU 1778 : rien
  • LANTHENAY 1778 : rien
  • MONTHAULT 1778 : rien
  • ROMORANTIN 1778 : rien
  • HOTEL-DIEU 1779 : rien
  • LANTHENAY 1779 : rien
  • MONTHAULT 1779 : rien
  • ROMORANTIN 1779 : rien
  • HOTEL-DIEU 1780 : rien
  • LANTHENAY 1780 : rien
  • MONTHAULT 1780 : rien
  • ROMORANTIN 1780 : acte de baptême d'Anne Louise BOURDERIOU
Voyant que sur toutes ces années, je ne trouve aucun Bourderiou ni Doré, soit c'est un trou sans enfants, décès et mariages dans cette famille, soit ils ont émigré quelque village plus loin. Je vais commencer ma recherche circulaire autour de Romorantin-Lanthenay pour voir si je trouve au moins mention d'un membre de la famille DORÉ ou BOURDERIOU...

VILLEHERVIERS
  • 1776 : rien
  • 1777 : rien
  • 1778 : rien
  • 1779 : rien
  • 1780 : rien
VILLEFRANCHE-SUR-CHER
  • LA COMMANDERIE-L'HOPITAL 1780 : rien
  • 1780 : rien
  • LA COMMANDERIE-L'HOPITAL 1779 : rien
  • 1779 : rien
  • LA COMMANDERIE-L'HOPITAL 1778 : rien
  • 1778 : rien
PRUNIERS-EN-SOLOGNE
  • 1780 : rien
  • 1779 : rien
  • 1778 : rien
  • 1777 : rien
  • 1776 : rien
LASSAY-SUR-CROISNE
  • 1780 : rien
  • 1779 : rien
  • 1778 : rien
  • 1777 : rien
  • 1776 : rien
MUR-DE-SOLOGNE
  • 1780 : rien
  • 1779 : rien

jeudi 9 mai 2013

Remonter de 1623 à 1408


Ah, magie de la numérisation d'archives grâce à laquelle je peux faire des bons de géant dans ma généalogie et faire des trouvailles qui auraient été le fait d'une vie entière autrement. En cherchant si les archives d'Orléans étaient sur Geneanet, je suis aussi allé voir sur le département du Cher dans les "archives et relevés". Une catégorie "Lieux inconnus" a éveillé ma curiosité. Je suis tombé sur de nombreux cahiers dont je ne comprenais pas grand chose avant de réaliser que je suis tombé sur une véritable mine d'or : le fond Girard de Villesaison.

Cet homme a passé une vie à éplucher les archives notariales de la ville de Bourges et à reconstituer les principales familles. Je suis immédiatement allé voir sur mes Jaupitre et j'ai trouvé de nombreux et précieux renseignements. Voici comment fonctionne ce fond :

  • les notes généalogiques sont des reconstitutions des familles par degrés à la manière des nobiliaires et possèdent de nombreuses références vers les cahiers généalogiques (numéro du cahier et page).
  • les cahiers généalogiques contiennent la transcription totale de tous les actes notariés de Bourges grâce auquel l'auteur a pu reconstituer les parentés.
Après avoir trouvé des renseignements sur de nombreuses familles de ce côté de la famille, j'ai voulu chercher sur mon ascendance Davril, une famille de Châteauneuf-sur-Cher dont l'acte le plus ancien que j'avais trouvé à ce jour datait de 1623 :

(source : Archives départementales du Cher - 3E468 - p. 82)
"Le treizie decemb aud An a esté baptisée Jehanne fille de Me Jehan d'avril Greffier a Channeuf et Anne Poncet ses parain e maraine sont Me Guillaume Picherron [?] e Jehanne Poncet soeur de la susdte Anne Poncet"
La famille Davril a donc donné des greffiers, procureurs, notaires, etc. tous installés à Châteauneuf-sur-Cher au début du XVIIème siècle. Je n'en savais pas plus pour l'instant et forcément, la partie alphabétique qui concernerait cette famille n'est pas encore mise en ligne sur le fond Girard de Villesaison.

Armes de la famille Davril
(source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
 Ne baissant pas les bras pour autant, je vais voir s'il parle d'une famille Poncet car je savais que des Poncet vivaient à Bourges. Et dans le fonds Girard de Villesaison, je trouve cette indication :

(source : Archives départementales du Cher - 2F254 - p. 192)
On voit bien une Anne mariée avant 1620 à Jean Gouraud et en secondes noces avant 1621 à Jehan Davril. Les dates coïncident avec le baptême le plus ancien que j'aie trouvé pour ce couple en 1623.

Remontant la famille Poncet, j'arrive à un couple Alain Poncet et Jeanne Tullier, mariés vers 1510. Essayant de trouver des renseignements dans la bibliothèque de Geneanet, je tape "Alain Poncet" dans le moteur de recherche et je tombe sur un seul et unique résultat : Mémoires de la société des antiquaires du Centre, mis en ligne sur Gallica/BnF où j'ai l'intégralité de la généalogie des Poncet (également contenue dans l'Histoire de Berry de Gaspard Thaumas de la Thaumassière).

(source : Mémoires de la société des antiquaires du Centre, p. 286, via Gallica/Bnf)
Remontant sur cette famille Tullier, j'apprends qu'ils ont été maires de Bourges et qu'un fils de cette famille (Pierre Tullier, doyen du chapitre de Bourges) fit réaliser un vitrail dans la chapelle Tullier située dans la Cathédrale de Bourges ! Sur ce vitrail, de nombreux membres de cette famille, dont mes ancêtres, Denis Tullier et Marie Bonin. Quelle chance inouïe de pouvoir avoir une représentation d'ancêtres du XVème siècle !

Pierre Tullier et Marie Bonin (source : MOSSOT, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)
Pour conclure, je vais donner ici la copie de la présentation de cette famille dans les Mémoires de la société des antiquaires du Centre :

Les armes de cette maison sont : d'azur au chevron d'or, accompagné de trois étoiles d'argent, 2 et 1. - SUPPORTS : deux licornes affrontées d'argent ; cimier : une triple couronne murale du même métal ; DEVISE : FIAT VOLUNTAS TUA.
Grandes armes de la famille Tullier
(source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
Tous les auteurs s'accordent à dire que la famille TULLIER, que l'on voit figurer dans les anciens contrats sous diverses appellations de Thieullier, Thuillier, de Tuillier, et plus généralement Tullier, tire son origine de la province de Bretagne. Le premier par lequel nous commençons cette généalogie, a dû venir à Boruges vers 1408, car la tradition se plaît à le représenter comme assez proche parent d'un Me Robert Thuillier, l'un des députés pour la recherche du meurtre commis à Paris, en 1407, sur la personne de Louis Ier, duc d'Orléans, fils de Charles V, par les ordres de son frère et rival Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne.

Meurtre du duc Louis d'Orléans, par le Maître de la Chronique d'Angleterre
(source : Bibliothèque nationale de France, domaine public, via Wikimedia Commons)
Ce Robert Thuillier, qu'Alain Chartier qualifie seulement de conseiller du roi, et que d'autres chroniqueurs font lieutenant civil et maire de Rennes, était attaché à la personne de ce malheureux prince ; les démarches actives qu'il fit pour seconder la duchesse, sa veuve, dans l'obtention de la justice qu'elle demandait au roi contre l'auteur de ce crime, lui attirèrent la haine du parti de Bourgogne, et cette haine se serait étendue sur tous les membres de la famille Thuillier. 

Valentina Visconti pleurant son mari le Duc d'Orléans, par Fleury-François Richard
(source : domaine public, via Wikimedia Commons)
Denis Thuillier ou Tullier aurait donc été contraint de s'expatrier pour échapper à la persécution qui le menaçait, et aurait demandé asile et protection à Jean, duc de Berry, qui l'aurait attiré à Bourges, où il lui aurait donné un emploi dans sa maison.De ce Denis est issu une nombreuse famille qui, pendant plus de 400 ans, a tenu à Bourges un rang distingué, remplissant les postes les plus honorables dans l'église, l'armée, la magistrature et l'université. Elle acquit la noblesse presqu'à son arrivée en Berry, par l'élévation de l'un de ses membres au mairat de la ville de Bourges (1479), suivant la constitution donnée à cette bonne ville en 1474, par le roi Louis XI, et ses descendants en ont toujours joui jusqu'à la Révolution, ainsi que des privilèges qui y étaient attachés."
Encore une fois, donc, une famille de noblesse de cloche (anoblie par ses charges municipales) ce qui explique sûrement la couronne murale comme cimier de leurs armes (qui est plus utilisée pour les blasons des villes que pour ceux des personnes). J'aurai l'occasion d'explorer davantage cette famille car il paraît que par les Bonin, ils sont reliés aux Bastard dont nous descendons déjà par les Jaupitre. Dans tous les cas, ma famille maternelle a des racines dans le Berry depuis plus de 600 ans ! Quelle chance d'avoir pu remonter jusqu'au Moyen Âge. Je retourne maintenant dans le Loir-et-Cher pour continuer mon exploration dans l'ordre des sosas afin de ne négliger aucune piste. Pour ceux qui ne comprendraient pas comment nous sommes reliés aux Tullier, voici notre ascendance depuis le plus ancien Tullier jusqu'à mon arrière-grand-père.

(source : Arbre familial, via Geneanet)

mercredi 8 mai 2013

Marie Catherine Rose, enfant légitime à quatre mois près


Je ne le dirais jamais assez, en généalogie, on découvre des choses chaque jour. Ainsi, un couple de mes ancêtres, Jean Maurice Souchay, tondeur, fils de Jean Souchay, blanchisseur de toile et de Hélène Audouin épouse le 7 janvier 1783, à Romorantin, Marie Catherine Rose Delahaye, fille de Pierre Firmin Delahaye et de Charlotte Catherine Vannier.

Je ne sais pas grand chose sur cette famille Delahaye puisqu'ils sont originaires de la paroisse Saint-Paul à Orléans. Les archives du Loiret seront en ligne en juin, mais uniquement le XIXème siècle pour l'instant ! Je vais devoir encore attendre avant d'explorer cette branche.

Ascendance depuis Marie Catherine Rose Delahaye jusqu'à mon arrière-grand-père
(source : Arbre familial, via Geneanet)


Toujours est-il que généralement, lorsque je trouve mariage d'un couple d'ancêtres, je saute neuf mois avant de chercher le premier bébé. Grave erreur ! Nos ancêtres n'étaient pas toujours des prix de vertu et au mois d'avril 1783, je tombe sur cet acte :

(source : Archives départementales du Loir-et-Cher - 4 E 194/44 - p. 13)
"L'an mil sept cens quatre vingt trois le Dimanche treize avril par nous soussigne a Ete Batizée marie catherine Roze ne de ce jour sur cette paroisse du Legitime Mariage de Jean Maurice Souchay qui a paru devant nous et de marie catherine Roze delahaie son parain a Ete Jean andre Souchay son oncle et sa maraine marie françoise pineau soussignés"
Conclusion, quand Marie Catherine Rose Delahaye épouse Jean Maurice Souchay, elle est déjà enceinte d'environ cinq mois, ce qui change ma vision de la scène. Encore un peu et le bébé à naître aurait été illégitime. Je trouve toujours amusant l'hypocrisie de l'époque qui veut que du moment qu'on soit marié avant la naissance, l'enfant est immédiatement légitime. Cette petite fille est-elle vraiment l'enfant de Jean Maurice ou bien est-ce un mariage arrangé pour sauver les apparences d'une grossesse "anticipée" ? Est-elle la fille de ses deux parents qui se seraient "connus" bibliquement avant le mariage ? Nous ne le saurons jamais.

mardi 7 mai 2013

Les lieux de vie de Julien Le Bourcier


Revenant d'un week-end dans la Sarthe, je m'étais organisé un petit planning afin de mettre un peu de couleurs aux pages en noir et blanc des registres d'autrefois. Je m'intéresse de plus en plus aux habitations où ont vécu nos ancêtres. Une fois qu'on a dégrossi les recherches et qu'on connaît les personnes, que faire pour en savoir plus à leur sujet ? Se rendre sur les lieux où ils ont vécu avec l'espoir de retrouver quelque chose du passé.

(source : photo personnelle, licence CC BY-NC-SA 3.0 FR)
J'ai donc fait une liste des lieux où mes ancêtres maternels et Sarthois (c'est-à-dire la famille Le Bourcier et leurs alliés) ont vécu et j'ai organisé une expédition dans l'espoir de découvrir des vieilles demeures.

Pour ceux qui se souviennent de Julien Le Bourcier, mort loin de chez lui près de Saint-Antoine-du-Rocher, je me suis rendu à la ferme de la Maillotière, devant laquelle on a retrouvé son corps.

La Maillotière, Saint-Antoine-du-Rocher, Indre-et-Loire
(source : photo personnelle, licence CC BY-NC-SA 3.0 FR)
Voici donc le bâtiment qu'a vu Julien Le Bourcier l'an XIII (1804) lorsqu'il est décédé. Un paysage assez plat, une forêt au loin, des champs tout autour de la ferme. C'est idiot, mais voir cette ferme en vrai rend cet ancêtre plus réel. Il n'y a pas vécu, il venait peut-être livrer des habits qu'il avait confectionnés dans une maison alentour ou au bourg de Saint-Antoine-du-Rocher lui-même. En tout cas, c'est ici qu'il décéda à l'âge (avancé pour l'époque) de 72 ans.

Ce même Julien Le Bourcier était né et avait vécu dans un lieu-dit nommé La Martinière, à Marigné-Laillé. Grâce à mon iPhone, j'ai trouvé très facilement le lieu-dit, et la ferme que j'y ai trouvé semble bien dater de la même époque. Quelques photos plus tard, j'ai pu me rendre compte du lieu concret de vie d'un aïeul tailleur d'habit au XVIIIème siècle. Une grande maison, mais avec une dizaine d'enfants et peut-être les grands parents qui vivaient là aussi, il fallait au moins ça. En voici quelques photos :

La Martinière, Marigné-Laillé, Sarthe
(source : photo personnelle, licence CC BY-NC-SA 3.0 FR)
La Martinière, Marigné-Laillé, Sarthe
(source : photo personnelle, licence CC BY-NC-SA 3.0 FR)
La Martinière, Marigné-Laillé, Sarthe
(source : photo personnelle, licence CC BY-NC-SA 3.0 FR)
J'ai également pris de nombreuses photos d'églises dans les villages où vécurent mes ancêtres. Certaines ont été rénovées au XIXème siècle, d'autres sont celles qu'ont vu les Le Bourcier, celles où ils se sont mariés, ont fait baptiser leurs enfants, etc. J'ai également de nombreux autres lieux-dits en stock, de quoi illustrer de nombreux billets de blog à l'avenir.

Si vous souhaitez-voir les églises de la plupart des lieux cités dans la première photo, elles sont sur les pages Wikipedia concernées que j'ai actualisées ce matin avec mes clichés. Et vous, avez-vous retrouvé la maison d'un ancêtre ?

vendredi 3 mai 2013

L'intriguante Marguerite du Maine



Quand on parcourt les vieux registres et les nobiliaires, on s'imagine toujours que nos ancêtres étaient sympas. On est content de retrouver des informations les concernants, mais, très souvent, on ne sait rien de leur personnalité. Alors, quand un texte d'un style délicieux (Ô XIXème siècle !) vient me dépeindre le caractère horriblement mauvais d'une ancêtre (à tempérer par une misogynie d'époque), je ne peux que le faire partager tant il est croustillant. Ce texte est issu de la Revue des Pyrénées et de la France méridionale dirigée par le docteur Félix Garrigou (Tome V, 1893, p. 169-175) disponible sur Gallica. Dans un chapitre d'une histoire consacrée au baron de Castelbajac, on raconte un morceau de l'histoire de mes ancêtres : Michel de Vabres et Marguerite du Maine.

(liens de parenté de Marguerite du Maine jusqu'à mon arrière-grand-père,
source : arbre familial, via Geneanet)

Le récit qui a suivre est donc entièrement issu de cette Revue. Je vais simplement l'agrémenter de quelques illustrations pour le rendre plus lisible :

Michel de Vabres, baron de Castelnau d'Estrétefonts, conseiller au Parlement de Toulouse, avait épousé en 1517 Marguerite du Maine, fille du seigneur d'Escandillac en Agenais & veuve du vicomte de Bruniquel.

(Armes de la famille de Vabres, source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
Il avait eu de ce mariage un fils, Bernard, & une fille, Claire. Il était fils & petit-fils de conseillers, son fils lui succéda plus tard dans sa charge. C'était une famille de robe.
Dieu me garde de médire de la robe qui fut une des forces vives de l'ancienne France. Gardienne fidèle & austère des vieilles traditions, elle peupla les cours & les parlements de magistrats au regard desquels les fonctions judiciaires étaient un sacerdoce exercé avec la religion & l'indépendance que réclame la vérité. Mais à côté de ces magistrats qui portèrent sous la orbe un coeur incorruptible, il n'y eut que trop souvent des juges sans conscience, rapaces, âpres au gain, pénétrés de cette abominable maxime que la justice étant une chose très rare ne devait pas se donner pour rien.
(Rétablissement du Parlement, à Toulouse, en 1469, par Alexandre Du Mège,
source : Rosalis, Bibliothèque numérique de Toulouse)

Tel paraît avoir été le conseiller de Vabres. Il avait acquis au commerce de la justice assez de biens pour mettre au-dessus de ses armes un tortil de baron ; il était seigneur de plusieurs paroisses à cloches, entrait aux Etats de Languedoc, portait l'hermine & le bonnet, & nul ne doutait que le mortier présidentiel ne coiffât un jour sa respectable tête.

(Tortil surmontant autrefois les armes des chevaliers,
source : Sodacan, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)

Le ciel l'avait gratifié d'une épouse accomplie. Une femme adroite, subtile, artificieuse, d'une avidité & d'une ambition démesurées, servie d'ailleurs dans la poursuite de ses rêves de fortune par une volonté opiniâtre que surexcitait la présence d'une grande fille à marier. Elle avait de la naissance. 

(Armes de la famille du Maine, source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)

Mariée en premières noces au vicomte de Bruniquel, un grand seigneur du Quercy qui portait le nom & les armes de Comminges, veuve & sans enfants, elle était passée de l'épée à la robe, espérant trouver dans cette déchéance les compensations de la richesse. 

(Armes de la famille de Comminges, source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
Elle les y trouva en effet ; mais il lui resta dans sa nouvelle fortune un regret du passé avivé journellement par les blessures de sa vanité & une rancune contre elle-même & contre cette déchéance dont elle chercha toute sa vie à se relever par les efforts d'une ambition violente. Voici un trait cité dans le document qui sert de trame à cette histoire.
"Le seigneur de Sarlaboux, nommé Odet de Cardeilhac, avoit espousé la fille aynée de la maison de Bize, laquelle sa mère & autres ses parents assuroient estre héritière universelle de ladite maison. Et quand il feut marié avec elle, print la charge de marier la seconde fille de ladite maison. Et quelques temps après, survint certain personnage inconnu, soydisant fils ayné de ladite maison, & se faisoit appeler le seigneur de Bize, lequel meut controverse contre le seigneur de Sarlaboux, à cause du bien & succession de Bize. Ce qu'apprenant, Marguerite du Mayne, lui acheta son droit & reprint le procès contre le seigneur de Sarlaboux. Et pendant le procès ledit personnage inconnu, soydisant fils ayné de la maison de Bize, décéda. Et poursuivit tellement, la dite du Mayen comme ayant-droit dudit fils inconnu, qu'elle obtint arrest contre le seigneur de Sarlaboux, qui feut exécuté. Et jouit quelque temps de la terre de Bize & après vendit son droit audit seigneur de Sarlaboux, à charge de payer à un nommé Francillon, capitaine d'Acqs, quelques sommes qu'elle luy devoit."
C'est dans les griffes de cette harpie que tomba le baron de Castelbajac. Il fut dévoré en une bouchée ; tout y passa, sa personne, ses châteaux, ses terres, son or, ses joyaux de famille, hélas ! & sa fiancée.
(Armes de la famille de Castelbajac, source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)

Il avait un procès au parlement de Toulouse avec le seigneur de Devèze, près Castelnau de Magnoac, au sujet de certains excès commis sur ses terres. Le rapporteur de ce procès était le conseiller de Vabres. Les subtilités & les détours de la chicane mis en oeuvre par sa partie & peut-être entretenus dans un secret dessein par le conseiller, obligèrent le baron à faire un long séjour à Toulouse. Il fréquenta la maison de son juge, & toujours bien accueilli & bien traité, fini par y devenir très familier. La conseillère vit bien vite quel homme était le baron & quel parti elle pouvait tirer pour l'établissement de sa fille. L'époux il est vrai était un peu mûr, tortu, malingre, sa figure était triste & son coeur aussi, mais qu'importait cela, il était le plus ancien & le plus riche baron du comté de Bigorre, un fameux gendre. Elle joua donc son personnage, se fit douce, prévenante, affectueuse, choya son hôte, l'entoura de soins, de gâteries, flatta sa vanité, fit valoir sa naissance, ses relations, le crédit de son mari, les grâces & les perfections de sa fille, &, un beau jour, les approches de la place étant faites, livra son dernier assaut & proposa le mariage avec sa fille.
Il y avait de longs jours que le seigneur de Castelbajac n'avait pas revu la dame de Tournous. Dans les délices trompeuses de la maison du conseiller, il oubliait les jours fortunés d'autrefois, les serments d'amour échangés sur les heures : l'image de sa fiancée se voilait dans son souvenir, sa volonté s'émiettait, sa conscience elle-même s'amollissait. Les perfides sirènes l'avaient, avec leurs douces paroles, comme endormi dans une incantation magique ; quand elles voulurent prendre son coeur, il le leur livra sans résistance & avec lui il donna son honneur & son repos.
Le triomphe de la conseillère de Vabres ne fut pas cependant sans amertume. Elle dut, pour assurer le succès de ses odieuses manoeuvres, lutter contre la malheureuse Anne, qui tenta mais en vain de défendre son bonheur, & essuyer les mépris & les affronts de la famille de son infortunée victime.
"Et vers ce temps, demoiselle Françoise d'Espagne, femme du seigneur de Devèze, estant en la ville de Tholose, poursuyvant un procès qu'elle avoit contre ledit seigneur de Castelbayac, lequel estoit adjourné à comparoir en personne au Parlement, Marguerite du Mayne, femme de M. de Vabres, conseiller au dit Parlement, pria mademoiselle de Banchysson en Albigeois, qui estoit aussy à Tholose, de luy conduire chez elle, en son logis, la dite dame de Devèze, car elle vouloit fort parler avec elle. Ce qu'avant appris ladite dame de Devèze, par le fils de la dame de Banchysson, fit répondre à la dite du Mayne, que si elle vouloit parler à elle qu'elle la vint trouver en son logis, chez une femme nommée La Fallote, en la rue des Couteliers. Ce à quoy elle consentit.
(Rue des Couteliers aujourd'hui, source : site internet de La Depêche)
"Ayant entendu l'heure de la visite, la dame de Devèze envoya prier le docteur de Maubrac, les protonotaires de Corneilhan & de Poy & mademoiselle Lagraurée venir en son logis pour entendre ce que ladite du Mayne luy vouloit dire & la responce qu'elle luy feroit.
"Et estant arrivée la dite du Maye, avec la demoiselle Claire sa fille, au logis ou estoient les dessus nommés & le protonotaire de Devèze & la demoiselle de Banchysson, la pria d'apointer du procès que poursuivoit le seigneur de Devèze son fils contre le seigneur de Castelbayac. Et lors luy demanda la dame de Devèze :
- Pourquoy, mademoiselle, portez-vous si grande affection au baron de Castelbayac ?
- Vous le savez bien, je lui veulx bailler ma fille que voici pour femme.
- Mademoiselle, je vous asseure que si vous baillez vostre fille à Monsieur de Castelbayac; vous la baillerez à un homme qui est marié.
- Et avec qui ?
- Avec une nièce de mon feu mary, fille de sa soeur & cousine germaine de mon fils, veuve du sieur de Ponsan, nommée Anne de Castelbayac, & feriez mieux de bailler vostre fille à un simple docteur de ceste ville.
- Cela est faulceté & ne se peult prouver.
"Ce qu'entendant se courroussa la dame de Devèze & adressant la parole à la demoiselle Claire luy dit :
- Mademoiselle, ceux qui vous conseillent d'espouser monsieur de Castelbayac n'ayment point vostre honneur, car il en a espousé une aultre.
" Laquelle Claire de Vabres ne luy fit aucune response. Et alors reprit la dame de Devèze parlant à la dite du Mayne :
- Sy un des paysans de la terre de mon fils avoit faict ce que monsieur de Castelbayac veult faire, je luy ferois bailler cent coups de fouet & filer deux quenouilles par la ville de Tholose.
" Lors prenant la parole le protonotaire de Devèze, nommé Bernard de Montesquiou, fils de ladite dame, ajouta : 

(Armes de la famille de Montesquiou, source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
- Mademoiselle, vous & vostre mary scavez bien que le seigneur de Castelbayac est marié & l'avez très bien sceu & entendeu du temps que vous vous teniez à Bize, près de Hèches, & ledit seigneur a un procès dont vostre mary est rapporteur & à ceste cause ce mariage est entrepris.
"Et sur telles paroles ladite du Mayne se leva pour retourner en sa maison & dit :
- De tout cela ne m'en soucie point & y mettrai bon ordre & ferai citer ladite Anne pour scavoir ce que en est."
Après le départ de son fiancé, Anne de Castelbajac s'était retirée à Tournous, petit village du Magnoac construit sur une colline où les maisons grises ombragées de chênes ou de chataigners s'accrochaient çà et là, les unes au-dessus des autres, au milieu des champs cultivés. 

(Armes du village de Tournous-Darré,
source : Etxeko, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)

Elle habitant avec son beau-frère le château seigneurial, modeste gentilhommière bâtie près de l'église, recouverte en tuile rouges, ornée d'une tour dont le toit aminci en forme de clocher s'élevait vers le ciel. C'était un lieu triste, solitaire, sans horizon, envahi par les bruyères & les grands bois touffus. La nature, cette généreuse fermière, y faisait mûrir à grand peine quelques maigres moissons. L'aspect de ce village n'a guère changé aujourd'hui ; les bruyères, il est vrai, ont rendu une partie du sol aux prés & aux moissons. Mais la sombre verdure des grands bois se découpe toujours sur le fond bleu du ciel & voile toujours à l'horizon la ligne lointaine des montagnes.
C'est là que la jeune femme attendait le retour du baron. Encore quelques jours, & là-bas, dans le beau château de Montastruc, elle serait à lui, bien à lui, dame de son coeur & de ses domaines. Leur libre volonté ferait d'eux des époux liés à jamais par les plus doux noeuds. Que ce jour était long à venir ! Elle en trompait l'attente par le souvenir de ces heures charmantes où, confiance dans les serments échangés, elle s'était donnée à ce grand seigneur qui l'avait recherchée, elle, pauvre & délaissée, pour en faire sa femme. Une immense reconnaissance envahissait son coeur, &, souriante & heureuse, elle attendait le jour fortuné, fière à l'avance de son bonheur.
Hélas ! elle fut arrachée brusquement à son rêve enchanteur par une lettre de sa tante de Devèze lui apprenant la trahison du baron. Elle en eut un frisson d'angoisse. Un grand vide se faisait tout d'un coup dans sa vie. Fini ce rêve charmant qui était devenu la seule joie de son existence, finie cette intimité, fini cet amour si généreusement donné & sitôt trahi. Une douleur inexprimable déchira son coeur & rouvrit toutes les blessures passées.
En quittant la maison de la Falote, la conseillère de Vabres n'était pas sans inquiétude. Si son hôte était vraiment marié, comme l'affirmait la dame de Devèze, l'échafaudage de ses beaux projets si laborieusement édifié s'écroulait misérablement.
Quelle était donc cette jeune femme, cette odieuse rivale qui avait pris le coeur du baron & reçu ses serments ? Malheur à elle, puisqu'elle se mettait sur son chemin ! Les pensées les plus violentes se heurtaient dans son cerveau. Elle prit néanmoins son parti. Il fallait agir promptement, citer la dame de Tournous à comparaître pour prouver ses droits, l'effrayer par l'appareil de la justice, par la menace d'une vengeance terrible, enfin la frapper au coeur en commettant ces actes odieux sous le nom de son fiancé. Sa résolution prise elle se mit à l'oeuvre. Ecoutons la malheureuse Anne raconter elle-même comment elle tomba, meurtrie, désespérée, sous les coups de cette femme.
"Et au retour de Montpellier, le seigneur de Castelbayac voulut espouser Claire de Vabres. Et avant l'espouser, un jour que ne sçai declarer, ainsy que je sortoi de la messe du lieu de Tournous, me fist adjourner, tant en son nom que de ladite Claire, pour declarer si je voulois empescher qu'il ne l'espousat. A quoy je prins si grande tristesse & desplaisir, me voyant ainsi deçeue & trompée, que je cheu en griefve maladie, dont je cuydai mourir, & m'en vint le mal caduque qui m'a despuis grandement vexé & molesté, mesmes presque tous les moys, une foys, deux ou trois foys, & m'a tellement débilité l'esprit que n'ay mémoire de celuy qui me cita, ne par devant quel juge, bien suis recors que celuy qui me cita estoit un prebstre de Montastruc. Et à ceste cause n'y envoyai comparoir, craignant aussy le père de ladite Claire de Vabres qui estoit conseiller à Tholose & Marguerite du Mayne sa femme, & pour ce n'ay osé poursuivre. Et à cause de ma maladie mes parents n'ont despuis teneu compte de moy, & ay eu tant d'affaires & nécessités que suis esté constrainte bailler mon bien à mon beau frère pour me nourrir."
La pauvrette n'était pas de taille à lutter contre tant de scélératesse, elle succomba, vaincue par la vie, cédant à sa rivale le coeur de son déloyal seigneur. Le baron de Castelbajac épousa Claire de Vabres ; ce fut son châtiment.

jeudi 2 mai 2013

Revoir les lieux de nos ancêtres


Lors de mon dernier séjour en Mayenne, je suis passé par Vimarcé et j'ai pu faire quelques photos de l'église du village où vécurent un couple de mes ancêtres au XVIIIème siècle. A mon retour, j'ai créé une page Wikipedia concernant cette église afin que d'autres généalogistes puissent en profiter et voir cette église depuis leur ordinateur.

Lorsque j'ai commencé ma généalogie, je m'intéressais à remonter le plus vite possible, sans vraiment faire attention aux détails. Depuis, je fais des recherches sur internet concernant les lieux où ont vécu mes ancêtres et les métiers qu'ils ont exercés. Certains bâtiments existent encore aujourd'hui. Prenons l'exemple d'un de mes ancêtres de la Dordogne : Jean de Saint-Astier.

Les renseignements que je possède à son sujet sont tirés du Nobiliaire universel de France (Tome 17) par Nicolas Viton de Saint-Allais. En voici un extrait :

"Jean de Saint-Astier, damoiseau, seigneur du Lieudieu et de Verzinas, en Périgord, et de Ligne en Auvergne, maître d'hôtel de Jeanne de Bretagne, était le troisième fils de Forton de Saint-Astier, seigneur des Bories, et de Jacquette Cotet, sa troisième femme. [...] Enfin, il mourut au château du Lieudieu, le 22 avril 1518, et fut enterré à Boulazac."
Jean possède donc trois seigneuries, dont celle du Lieudieu où il semble vivre principalement puisque c'est l'endroit où il décède. Quelques recherches sur Wikipedia m'indiquent que le château du Lieu-Dieu est situé dans cette commune de Boulazac dont il est ici question.

(source : Père Igor, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)
Ce magnifique château de contes de fées se nommait originellement la Baconnie. Le nom du Lieu-Dieu lui aurait été donné après que les saint-sacrements des églises alentours furent mis au tabernacle de sa chapelle pour éviter toute profanation des hosties par les mercenaires anglais qui ravageaient le pays durant la guerre de Cent Ans.

Continuons la lecture du nobiliaire :

"Il avait épousé, par contrat passé au château de Hautefort, le dernier jour d'août 1488, demoiselle Gabrielle de Hautefort (Gontaut), fille de feu noble homme Antoine de Hautefort, seigneur des châteaux et châtellenies de Hautefort et de Thenon, et de dame Marguerite d'Abzac ; elle était alors sous la tutelle de sa mère, et de Jean de Royère, chevalier, seigneur de Lons, et fut assistée de nobles Jean d'Abzac, seigneur de la Douze, Jean de Saint-Astier, seigneur des Bories, Jean d'Abzac, seigneur de Bellegarde, etc., ses proches parents : sa dot fut réglée à quinze cents livres tournois."
Comme souvent en ces temps anciens, la future épouse est bien plus riche et d'une plus grande famille que le marié. Il suffit de voir la différence entre le petit château du Lieu-Dieu avec l'énorme château de Hautefort pour en juger.

(source : MOSSOT, licence CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons)
Je vais dans quelques jours repartir pour la Sarthe. J'espère prendre plusieurs photos de Marigné-Laillé et de Mayet où vécurent mes ancêtres Le Bourcier afin de reconstituer une partie de leur quotidien et de voir les bâtiments qu'ils ont vu, les églises où ils ont fait baptiser leurs enfants, etc.

Pour conclure, une belle histoire concernant le blason des Saint-Astier. Le blasonnement est le suivant : d'argent à trois aigles de sable posées en chef 2 & 1, et en pointe trois cloches du même émail, bataillées d'or, posées également 2 & 1.

(source : dessin personnel, licence CC BY-SA 3.0)
Les armes se contentaient autrefois de trois aigles. Mais, le 8 juillet 1275, les cloches de toutes les églises de Limoges se mirent à sonner miraculeusement à la mort de Pierre de Saint-Astier, évêque de Périgueux. Depuis, en mémoire de ce miracle, les trois cloches ont été ajoutées au blason de la famille.